J'essaye depuis peu de faire la liste
des choses que je voudrais raconter à mon retour pour surprendre,
amuser et intéresser mon auditoire quand on me posera la fatidique
question :
« Alors, c'est comment le Burundi
? »
Je commence d'ores et déjà pour mes
fidèles lecteurs qui n'auront peut-être pas l'occasion de me voir
pour satisfaire leur curiosité. Quelques évidences invisibles que
je ne remarque même plus, à force, mais qui donnent une idée du
pays.
La première chose qui vous frappe en
quittant l'aéroport : une foule marche en permanence sur le bord de
la route, et ce jusqu'au centre ville. Idem si vous continuez sur les
axes principaux qui rejoignent les quartiers populaires. Seuls les
quartiers résidentiels comme le mien semblent épargnés par ce
défilé digne d'un premier jour de soldes sur les
Champs Élysées. Certains Burundais choisissent le vélo,
d'autres prennent le bus qui coûte, depuis la récente augmentation
330 Fbu (soit presque 20 centimes d'euro !), rares sont ceux qui
possèdent une voiture, donc la majorité va à pied. Qu'il pleuve où
que le soleil brûle, qu'ils aient 500 mètres ou 10 kilomètres à
faire, peu importe, ils marchent toute la journée.
Une fois en centre-ville, les policiers
vous sautent aux yeux. Ou plus précisément la grosse kalachnikov
qu'ils tiennent entre les mains, le doigt sur la détente. Vous
croiserez parfois des flics armés saouls comme des barriques... Ne
pas paniquer. C'est, pour eux, le seul moyen d'asseoir leur pouvoir
sur le reste de la population, qui n'a que peu de respect pour ces
personnes généralement corrompues (car sous-payées par le
gouvernement, rendons à César ce qui est à César). Une
kalachnikov est un bon argument. Travaillant avec les militaires, je
me suis habituée à ce contact quotidien aux armes : certains de mes
étudiants ainsi que mon collègue Édouard viennent en cours le
pistolet à la ceinture. Vous pourrez aussi prendre le bus à côté
d'un militaire qui tient son arme sur ses genoux. Priez.
Une autre présence un peu plus
dérangeante : celle de la mort. La plus visible est celle causée
par les accidents de la route (bah oui, vu le nombre de piétons,
statistiquement, ils sont bien plus nombreux à se faire renverser).
Plutôt choquante, la première fois que vous apercevez un corps
étendu à côté d'une belle flaque de sang et des gens en pleurs à
côté d'un bus arrêté au milieu de la route. Toujours aussi
choquantes, la deuxième fois et les suivantes. Les autres causes de
mort telles que la malaria ou toute maladie mal soignées font
également des ravages: Les week-ends des Burundais sont, quand il ne
s'agit pas de mariage, souvent consacrés aux cérémonies de levée
de deuil...
Finalement, un fait un peu plus
plaisant : pour tous ceux qui auraient vu une ville africaine comme
Nairobi ou Kinshasa, sachez que Bujumbura a l'air bien propre en
comparaison. Des employé(e)s du gouvernement ainsi que les travaux
communautaires du samedi matin permettent d'éliminer les déchets et
la végétation sauvage, laissant la ville extrêmement propre.
Chacun brûle ses déchets dans son jardin, bien que je ne sois pas
convaincue du bien fondé écologique de cette situation. On n'est
pas encore arrivés au stade de propreté de Kigali mais on s'en
approche. Reste à enseigner à la population locale que non, les
choses jetables ne sont pas jetables dans la rue, et là il y a du
boulot...